La respiration Wuji

par Anne Augé, d’après les enseignements de mon Maître, Liu Deming (Ecole Ziran Men) et d’après les travaux de Régis Blin (Collège SFERE).

 

 

En Ziran Qigong, on parle des trois visages de la respiration : l’inspiration, l’expiration et le temps Wu Ji

L’eau peut porter le bateau ou le détruire. De même pour l’oxygène avec le corps.
Si on enchaîne inspir/expir/inspir/expir … l’oxygène peut devenir délétère.

Ici, la respiration n’est donc pas vue comme une alternance d’inspirs/expirs mais comme une continuité.
Et cette continuité s’établit entre l’inspir et l’expir, pendant un temps d’expansion de l’inspir qu’on appelle Wu Ji.

Mais attention, il ne faut surtout pas retenir sa respiration, seulement la suspendre.
Le Wu Ji n’est pas une apnée. C'est un temps de suspension qui permet au corps de se détendre.

Terre rétentive et Terre propulsive

Pour vous parler de cette respiration Wu Ji, revenons sur la notion de Terre rétentive et de Terre propulsive. En effet, des 5 Dynamismes établis par les taoïstes, la Terre est celui qui tend à être en équilibre Yin/Yang. Elle est l’élément du centre et l'élément de la transition aussi.

La Terre reçoit la chaleur et la pluie du Ciel. Elle accueille la graine puis elle produit les végétaux. Elle transforme en minéraux. Elle reçoit et elle donne. Yin et Yang.

Dans son aspect propulsif, elle produit l’expansion. Grâce à son aspect rétentif, elle ramène au centre, évitant ainsi que l’expansion ne se termine en explosion. Le Qi s’expand, s’expand ..., puis se concentre alternativement.

« Ô, temps, suspend ton vol… » Lamartine

Mais l’inversion ne se produit pas brutalement, ce qui précisément produirait une alternance.
Elle se produit pendant un temps de suspension durant lequel les deux ondes (inspir et expir) se croisent comme se croisent les vagues qui arrivent sur la plage et celles qui repartent.

Sur le plan physique, lorsque mon inspir s’étend de façon infinie, mon Corps en expansion s’ouvre interminablement et ma Conscience y voyage très profondément à l’intérieur.

Quand je suspends, à la fin, cela crée une tension et une compaction profonde dans le corps. Il y a à la fois une expansion dans le corps en même temps qu’une densification.

Quand je relâche, je ne lâche pas tout d’un coup, mais je laisse se prolonger, se prolonger, jusqu’à rentrer dans le mouvement respiratoire inverse. Et l’énergie commence à circuler.

JE ne respire pas volontairement, je SUIS respirée

Il n’y a donc ni alternance, ni apnée. Seulement continuité et suspension.

Le Wu Ji c'est un temps infiniment continu et spacieux. J’y ai tout mon temps. C'est lumineux et délicieux. C’est comme une mélodie. Le mouvement se crée doucement et se déploie doucement comme une onde. Le Wu Ji, c'est un mouvement sans mouvement. Et cela crée de la joie à l’intérieur.

La respiration Wu Ji nettoie, unifie et harmonise

Cet état de Wu Ji, entre l’inspir et l’expir, travaille profondément au niveau cellulaire.
Il est important pour oxygéner le sang et donc mieux nourrir les organes internes.

C’est un peu comme la circulation du sang, le sang qui apporte tous les nutriments et tous les éléments aux cellules. Au bout des capillaires il y a aussi ce processus qui passe du vaisseau à la cellule.

Inséparables et complémentaires, et toujours en mouvement

Tant qu’on est vivant dans ce monde manifesté, Yin et Yang vont toujours ensemble. Pendant que l’un grandit, l’autre diminue d’autant. Les pourcentages de chacun évoluent sans cesse, mais l’ensemble fait toujours 100%.

Donc l’énergie peut bouger à l’intérieur de la balle Yin/Yang, mais en restant dans l’unité à l’intérieur de cette balle d’opposés.

Lorsqu’on inspire ou expire tout d’un coup, c’est comme si on coupait la balle en deux et séparait ainsi Yin et Yang qui ne pourraient plus se déplacer l’un par rapport à l’autre.

En résumé

Dans la transition entre l’inspir et l’expir, ça ralentit, ça s’ouvre progressivement et ça bascule doucement dans l’autre phase. C’est la même chose que dans la nature. Entre le moment où la feuille est mue par le vent et le moment où elle se pose, il y a un temps de transition.

Entre les deux temps respiratoires, un troisième s’insère et cela s’appelle la respiration Wu Ji ou l’expansion. Ce temps de suspension est entièrement guidé par la Conscience. C'est elle qui crée de l’espace, sans aucune action volontaire.

Cette petite suspension est très importante car elle ouvre le corps et prolonge le temps durant lequel l’oxygène peut être transporté partout par l’hémoglobine. Ce qui favorise ensuite un grand nettoyage, à l’expir.

Ces techniques de respiration profonde permettent de renforcer le système respiratoire, et ainsi de renforcer le lien entre la respiration et le Shen, l’esprit.

L’autre intérêt de ce travail, c'est l’étirement de tous les fascias et de toutes les membranes. Ce qui permet de préserver la souplesse et l’élasticité des organes. C'est le Qi à l’intérieur du Qi.

Et enfin, ce travail permet d’étirer/relâcher le diaphragme dans toutes les directions. Et notamment d’étirer toutes les cruras du diaphragme (= insertions du diaphragme sur la cage thoracique).

Dans la vie, on a peu l’occasion de mobiliser le diaphragme. Et s’il n’est pas assez mobilisé, il va accumuler les toxines dans le corps (alors on se sent comprimé et lourd). Ce travail va permettre un nettoyage interne des toxines.

Anne Augé

D’après les enseignements de mon Maître, Liu Deming (Ecole Ziran Men) et d’après les travaux de Régis Blin (Collège SFERE).